Les radotages de mamie
LES RADOTAGES de ...
...Mamie !
Septembre 2008
Les petits enfants sont sur la partance. Je « roumègue », car la télé ressasse année après année me même reportage sur nos chères têtes blondes qui vont « affronter » la RENTREE des classes ! Et ça y va : les larmes des tout petits, le poids des cartables, les fournitures... Quand tout à coup, une petite voie m'interpelle :
« Dis Mamie ? C'était comment de ton temps l'école ? »
Cette petite question, si affectueuse, ingénue et sans arrière pensée me brusque tout d'un coup !
Cette juxtaposition des mots « Mamie » avec l'utilisation de l'imparfait, qui plus est, aggrvée des termes« de ton temps », me positionne tout à coup sur l'échelle du temps et me renvoie, hélas au siècle dernier ! CIEL ! ...
Mais, la petite voie continue, têtue :
« Alors, Mamie, dis, tu raconte ? »
Des auteurs contemporains, SIGNOL, BORDENAVE, COULONGES, JEURY ont si bien décrit l'école du 19 ème et 20 ème siècle, que je les invite à lire leurs romans. Ils y trouveront tous les détails, la nostalgie, la mélancolie. Hélas, c'est la coalition des trois petits enfants
« Mais Mamie, c'est de toi, de ton école à toi, que l'on veut que tu nous parles ! Allez, raconte ! »
L'insistance est forte et je sens qu'il n'est pas question de se défiler ! Après tout, les adultes que nous sommes devenus ont bien le droit de ne pas rester anonymes. Nous ne serons jamais des héros de romans, mais notre vieille école garde en mémoire nos pas, nos jeux, nos cris, nos pleurs, nos rires.
Et me voilà, comme le MER'GRAND à égrener les souvenirs !
Donc, année 1952 : mon premier jour d'école et qui à bien mal commencé !
Ma maîtresse : pas de souvenir de son nom !
Une dame, pas très gentille !
Pensez donc: elle m'a tiré les cheveux, car je me retournais pour voir les autres camarades !
Ah mais ! Ce ne sont pas des façons de faire ! Je ne le raconterais pas à mes parents, car j'attraperais une gifle en rentrant... mais c'est décidé et irréversible, à tout jamais, cette maîtresse était une « peau de vache » ! Voilà !
Les petits me regardent éberlués... :
« Tu n'a pas été traumatisée ? »
Certes, non ! Il nous en fallait plus !
Les petits allaient « chez Madame », les grands chez « Monsieur »
Combien étions-nous au total ? 35 ou 36 dont 5 ou 6 enfants de l' ASSISTANCE PUBLIQUE à se répartir ainsi sur deux classes.
Deux ou trois années plus tard, j'ai pris le rythme du chemin de l'école, et je garde un souvenir impérissable du trajet.
En bout de chaque chemin il y avait le « PEDIBUS » ! Eh oui ! Les villes découvrent seulement maintenant, ce nouveau moyen de transport, pour économiser le gaz-oïl ! Le milieu rural l'avait mis en place il y a 50 ans ! Et... on nous traite de Ploucs !
Donc, nous attendions, cartable en main, le passage de ceux qui venaient de plus loin : Champ d'Albi, Ginal, Cauzières, Las Bordariès... au moins 10 gosses, qui faisaient racler leurs galoches sur la route empierrée.
« Des galoches ? Tu n'avais pas des NIKES ou des ADIDAS ? »
« Tu n'y allait pas en voiture ou en vélo ? » s'exclament-ils !
Soupir de ma part et mon silence vaut réponse.
Les grandes prenaient toujours un petit par la mains. Les garçons bien entendu, faisaient les malins, et, goguenards agaçaient les filles.
Et c'était bien entendu, des taquineries, des courses... parfois des coups de cartable ! Notre jeu favoris était de chaparder nèfles ou pommes dans un champ voisin. Ces fruits étant bien meilleurs que chez nous ! Mais gare à ne pas se faire voir du propriétaire ! Nous étions tellement discrets ... qu' immanquablement il nous guettait et promettait qu'il le dirait aux parents ! Cela calmait nos ardeurs... et notre envie de savourer le fruit !
Chaque saison apportait son lot de découvertes.
Au printemps, quel plaisir de patauger dans les fossés à la recherche des têtards !
Ah ! Les grattes culs d'automne que l'on écrasait dans le dos des copains, dans l'espoir de les voir se gratter toute la journée.
Les journées de brouillard, engoncés dans nos pèlerine et cache-nez, nous transformaient en fantômes mouvants. Nos cris et nos paroles étaient atténués.
L'hiver, malgré nos doigts rougis par le froid et nos lèvres gercées, il était enivrant de glisser sur les mares gelées ! Certains, sont même passés au travers et sont rentrés chez eux bien... humides !
Tout le long du parcours, chaque ferme apportait son lot d'enfants. C'est une tribu bien bruyante qui arrivait à la Salle, avec la convergence de Tels, le Py, le Fabet, la Bro, Cougoureux.
A la vue du Maître et de la Maîtresse, le calme s'instaurait.
Tous en rang, s'il vous plaît ! Et chacun présentait ses mains pour vérifier la propreté des ongles. On avait beau rentrer les doigts dans la paume de la main, hélas, certains d'entre nous fileraient à la pompe ! Je ne sait plus si la propreté y gagnait, mais je me souvient des élancements jusqu'au coude provoqués par l'eau glacée.
Les « éloignés » déposaient sur le poêle, leur gamelle contenant leur dîner.
Chacun, debout à côté de son bureau, attend le signal. Pas question de s'asseoir !
J'entends encore le raclement des chaises, la dépose des cartables, le « huic, huic » des bureaux qui se lèvent... et c'est la distribution des cahiers. Ils sont tous recouverts de papier bleu avec notre nom et la matière enseignée.
Et venait ensuite les redoutables sentences :
« Tu écris comme un porc ! »
« était-ce notre faute si des mouches tombaient dans l'encrier et que la plume fasse des pâtés ?
« Tu n'a pas appris ta leçon ! », grondait l'instituteur.
Oui, d'accord ! Mais lui, il n'avait pas à aller garder les cochons, le soir en rentrant !
Vraiment pas commode, d'étudier les fables de la FONTAINE avec ces bestiaux qui ne pensaient qu'à aller chez le voisin, savourer betteraves et choux !
Il était hors de question de chercher un justificatif quelconque... d'ailleurs, entre nous, des cochons, l'instituteur ne connaissait que les boudins ou la saucisse que les parents lui offraient.
Alors !... Va pour la mauvaise note ou la punition : 100 lignes minimum !
Moi, je préférais les lignes, plutôt que d'aller au piquet.Ca, c'était impossible à supporter. Surtout devant la vitrine au fond de la classe. Songez les enfants qu'il y avait des bocaux, avec entre autre, des couleuvres, des crapauds, vipères, gardés dans du formol !
Et là, je marque des points dans mon récit car c'est unanimement que j'entends :
« Quelle horreur ! Pourquoi tout ça était en conserve ? »
Je ne peut apporter aucune réponse plausible à cette remarque.
Ah! la récréation !
Ronde et marelle pour les petits, partie de « béret », chat perché pour les grands sans oublier les billes et les osselets !
Une fois par semaine la sortie s'accompagnait de grosses bousculades. Le boulanger lançait des buvards à travers la portière. C'était une course effrénée.
Chacun voulait en avoir plus que son voisin !
Qu'ils étaient beaux ces buvards avec les châteaux de la Loire sur la face ! Mais bien entendu, les grands sortaient, sans gloire, vainqueurs de la récolte ! Les larmes des petits ne les émouvaient guère et c'est même avec des « na,na,na, tu n'en as pas eu ! » qu'ils s'enfuyaient en brandissant leur trésor ! Ah, les peaux de vaches ! Mais l'espoir était là, car la semaine d'après on aurait peut-être notre chance.
Le retour à la maison, avait le même cérémonial que le matin, avec peut-être plus de bruit et de cris, il fallait bien se défouler ! Et puis les tartines de confitures attendaient à la maison.
Allez, les enfants, tout cela c'est bien loin.
Je ne me suis jamais ennuyée à l'école.
Les conditions étaient rudes, mais je n'ai aucun souvenir désagréable.
« Dis tu nous raconteras encore, l'école de l'ancien temps ? »
Et, voilà, il faut qu'ils en remettent une couche !
M.F. MARSAL
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